Conférence – « L’Avenir des chrétiens dans les pays du Moyen-Orient »

Conférence – « L’Avenir des chrétiens dans les pays du Moyen-Orient »

« L’Avenir des chrétiens dans les pays du Moyen-Orient ». Tel est le thème merveilleusement bien traité par S.Em. le Cardinal Bechara Boutros Rahi, patriarche maronite d’Antioche et de tout l’Orient lors d’une conférence à la Basilique du Sacré-Cœur de Marseille le 26 novembre dernier. L’Eglise Maronite est l’Eglise catholique du Liban et la plus grande communauté catholique au Proche-Orient.

            Aborder le thème de l’avenir des chrétiens dans les pays du Moyen-Orient

Ce thème est posé à cause des guerres et des conflits en cours, en Iraq, en Syrie, en Palestine et dans d’autres pays du Moyen-Orient. Ils ne sont pas entre musulmans et chrétiens, mais entre musulmans Sunnites et musulmans Shiites, entre l’Arabie Saoudite et l’Iran pour des buts économiques et politico-stratégiques ; ils sont aussi entre Organisations terroristes avec des mouvements fondamentalistes, et Autorités politiques locales, entre Régimes et Oppositions. Les chrétiens en sont victimes comme beaucoup d’autres citoyens musulmans. Le nombre des chrétiens, par conséquent, souffre d’une forte hémorragie migratoire. Il est absolument nécessaire de cesser les guerres, trouver des solutions politiques aux différents conflits et établir une paix juste, globale et durable dans la région, pour encourager le retour des chrétiens à leur terres d’origine et y rester.

Il ne faut pas oublier que, quand nous parlons des chrétiens, nous ne parlons pas exclusivement d’individus éparpillés, mais plutôt d’Eglises tant Catholiques qu’Orthodoxes et Protestantes qui assurent la présence chrétienne, depuis 2000 ans, dans ces différents pays et y exercent une forte influence culturelle, sociale et politique, surtout au Liban, grâce à leurs structures, écoles, universités et centre socio-humanitaires.

Toutes ces Eglises affermissent leurs propres fidèles dans la foi chrétienne et les encouragent à rester dans leurs propres pays, pour témoigner de l’Evangile du Christ, assumant leur rôle de gardiens des racines de la chrétienté. Ils sont sûrs que tant qu’il y a l’Eglise du Christ dans le monde arabe, il y aura toujours des chrétiens. Ils sont sûrs, que Dieu ne permettra jamais que cette terre moyen-orientale, où l’histoire du salut a commencé et les Mystères Divins se sont révélés, soit vidée des chrétiens et privée de la voix de l’Evangile. Cette foi chrétienne est pour nous comme une pierre angulaire sur laquelle nous confirmons notre espérance. Cette même foi inspire notre attitude de résistance spirituelle et d’engagement pour l’avenir.

Les défis et les solutions

 Nul n’ignore que les chrétiens, comme tous leurs concitoyens, vivent dans une situation d’instabilité politique, économique et sécuritaire. Elle est due aux conflits insolubles, aux guerres imposées, aux violences sans frontières, à l’avenir incertain. Les victimes sont principalement les familles comme telles et les jeunes générations. Ils ont tous un seul rêve qui est celui d’obtenir un visa étranger et quitter leurs propres pays.

En plus de la résistance spirituelle et morale, il faut que la Communauté Internationale et nommément l’ONU s’engage sérieusement à arrêter les guerres et trouver des solutions politiques aux conflits qui causent ces guerres et favorisent les mouvements fondamentalistes et soutiennent les organisations terroristes. Ces solutions sont connues ; il faut la bonne volonté pour mettre en priorité le bien commun et la paix entre les nations.

Les guerres en Irak, Syrie et Yémen ont à leur origine le conflit entre l’Arabie Saoudite, musulmane Sunnite, et l’Iran, République Islamique Shiite, pour buts économique, stratégique, politique et confessionnel. Il faut parvenir à une certaine “réconciliation” politique et une entente d’intérêts entre ces deux puissances régionales, pour ouvrir la voie à une entente nationale entre les régimes locaux et les oppositions en Syrie, Iraq et Yémen. Les reformes politiques ne peuvent pas être imposées de l’extérieur, mais décidées par la libre volonté des citoyens. Il faut d’autre part, dompter les mouvements fondamentalistes et les organisations terroristes. Nous ne pouvons pas imaginer que la Communauté Internationale soit incapable de parvenir à ces solutions.

Le double conflit ardent Israélo-Palestinien et Israélo-Arabe trouve sa solution politique dans différentes Résolutions du Conseil de Sécurité, émises successivement, depuis 1948. Il s’agit : de reconnaître un Etat Palestinien à côté de l’Etat d’Israël et en bonne entente avec lui ; d’assurer le retour des réfugiés palestiniens à leurs terres d’origine et d’obliger Israël de retirer ses troupes des territoires occupés en Palestine, Syrie et Liban.

Un autre grand défi est celui des déplacés et réfugiés Irakiens et Syriens. Ceux-ci sont sur la conscience de tous les pays qui ont causé, fomenté et soutenu les guerres, sous prétexte d’établir la démocratie et d’opérer des réformes politiques dans les pays du Levant qui sont maintenant complètement ravagés. Il faut d’un côté leur montrer la solidarité socio-humaine et leur réserver le bon accueil, et de l’autre les aider à rentrer chez eux, à reconstruire leurs foyers et jouir de tous leurs droits de citoyenneté.

          La situation du Liban

Je voudrais attirer Votre attention au grand danger qui menace le Liban à cause du nombre exorbitant des réfugiés : les Syriens sont un million et demi à très grande majorité musulmane Sunnite et augmentent chaque année entre 40.000 et 50.000 nouveau-nés, en plus d’un demi-million de réfugiés palestiniens. Ils constituent tous ensemble le nombre de 2.000.000 c’est à dire la moitié de la population du Liban, sur un territoire de 10.452 km2 formé de montagnes et de vallées. Le danger est économique, culturel, sécuritaire et politico-confessionnel. Pourquoi sacrifier ce pays, modèle de convivialité multiconfessionnelle et multiculturelle, de démocratie, d’ouverture et d’égalité entre les chrétiens et les musulmans ? Pourquoi ne pas pourvoir des lieux d’accueil pour les réfugiés syriens en Syrie, sachant que le territoire syrien est 18 fois plus grand que celui du Liban ? Pourquoi le Liban doit il assumer la responsabilité de tous ces réfugiés et non les autorités syriennes ?

Conclusion

Je voudrais Vous assurer, chers amis, que notre ferme volonté et propos est de maintenir la présence chrétienne dans le monde arabe qui est le nôtre. Car notre foi chrétienne nous le dicte, et la mission qui nous a été confiée par notre Seigneur Jésus-Christ depuis 2000 ans nous le requiert.

En même temps, nous comptons sur les pays amis dont la France en premier lieu, pour mettre en relief l’importance de la présence des chrétiens dans le monde arabe et déployer les efforts nécessaires pour arrêter les guerres, trouver les solutions politiques aux conflits et assurer le retour des déplacés et des réfugiés à leurs propres pays et propriétés.

Nous, les chrétiens et les musulmans du monde arabe, tenons à continuer à vivre ensemble puisque une culture commune et un destin commun nous lient. Nous sommes “appelés, comme écrit le Pape Saint Jean Paul II, à construire ensemble un avenir de convivialité et de collaboration, en vue du développement humain et moral de nos peuples. De plus, le dialogue et la collaboration entre chrétiens et musulmans au Liban peut aider à ce que, dans d’autres pays, se réalise la même démarche” (Espérance Nouvelle pour le Liban, 93).

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