La dignité humaine couvre tout l’homme et tout homme.

La dignité humaine couvre tout l’homme et tout homme.

La dignité humaine épuise la totalité de la personne humaine. Il n’y a rien en l’homme qui ne soit couvert par la dignité. Son âme, son corps, son travail, son agir, tout doit être mis sous le regard de la dignité et tout doit être respecté en tant que tel. L’âme humaine est la plus digne de ce respect. Le corps n’est pas exclu. Ce n’est pas une simple enveloppe qui enfermerait une âme en attente de sa libération. Aristote et saint Thomas en parleraient bien mieux ! Le corps permet à l’âme de se développer, car c’est par la médiation du corps et seulement par lui que je peux nourrir mon intelligence et alors par des actes volontaires user de ma liberté vraie. Si l’homme est digne, ses actes reçoivent  la même dignité, pour peu qu’ils soient humains.

Un acte est posé par la volonté sur proposition de l’intelligence. Pour qu’un acte soit humain, il faut donc qu’il soit le fruit d’une volonté droite et d’une intelligence libre. Aussi, bien des actes posés par des hommes ne sont-ils pas humains. Au mieux sont-ils animaux, voire bestiaux. À ce moment-là, ils perdent la dignité liée à leur auteur. Lui en revanche, même s’il ne pose que des actes non humains conserve sa dignité inaliénable. Pour que l’homme puisse vivre conformément à sa dignité et ne pas, peu à peu, se déshumaniser par un comportement animal (c’est à dire réflexe et instinctif), il faut que ses actes soient humains. Il convient donc de travailler à l’humanisation des actions humaines, donc à leur réelle libération !

Il est aussi un droit à la vie tout aussi inaliénable que les précédents. Il appartient à la dignité de l’homme que celui-ci vive. Mais vivre n’est pas simplement le fait de naître et de venir à l’existence. Il y a en propre dans tout être vivant, du végétal à l’animal, une poussée de l’être dans un mouvement dynamique qui tend vers l’accomplissement de cet être. Ainsi, chaque être tend naturellement vers l’accomplissement de lui-même, c’est-à-dire la pleine réalisation de ce pourquoi il est fait. La vie n’est autre que la lente construction de cette réalisation de soi. Qu’elle soit inconsciente, comme dans le cas des végétaux ou des animaux, ou bien consciente dans le cas d’un être humain, cette réalisation de soi porte en elle le sens de la vie, elle est native à toute créature. L’homme ne se réalisera pas dans une vie animale ou végétale. Aussi, la dignité de la personne humaine exige-t-elle d’entreprendre, ou d’avoir les moyens d’entreprendre, le plein accomplissement de soi. Soi étant entendu dans l’acception humaine de la personne spécifiée dans et par l’individu qui fait qu’il n’existe pas d’être humain en soi, mais des êtres humains particuliers et personnels. C’est à ces personnes individuées que doivent être proposés les moyens de leur réalisation. Ce sont ces personnes particulières qui doivent s’accomplir et ainsi vivre dignement. Ce sont elles qui doivent acquérir l’autonomie de leur personne, préalable indispensable à l’accomplissement de soi. Il n’y a pas de dignité de la personne humaine sans la dignité de chaque personne. Aussi, entendons-nous ‘droit à la vie’ comme un droit élémentaire de vie biologique et un droit spirituel d’accomplissement et d’épanouissement. Le don de la vie n’est pas in fine un don biologique, il est avant tout un appel au bonheur. Ce bonheur passe par l’accomplissement de soi.

Au final, la dignité de l’homme trouve sa justification et sa définition dans cet accomplissement, à savoir permettre à l’homme de s’avancer vers cette Félicité identifiée très tôt par Aristote. Nous sommes loin de la définition socialiste selon laquelle l’homme trouve sa dignité dans le travail qu’il accomplit pour la société ; loin de la conception libérale qui met la dignité de l’homme dans sa capacité productive ! La dignité de l’homme n’est soumise à aucune autre fin que le bonheur de l’homme lui-même. L ‘économie et la société sont au contraire au service de la dignité humaine. Elles doivent la promouvoir, la construire et la protéger. Le drame de l’humanité actuelle est d’avoir interverti les subordinations.

Le respect et la restauration de le dignité humaine passent par une prise en compte et un accomplissement de la dimension spirituelle de l’homme. Il ne pourra jamais se trouver un homme comblé dans sa seule dimension corporelle. Manger, boire, dormir, se loger, se reproduire ne sont pas des attributs proprement humains. Ils appartiennent à la dimension commune à l’animal et à l’homme. Une société qui se contenterait de satisfaire ces simples besoins, même si c’est de manière intelligente, ne produirait au mieux que des animaux plus développés que les autres. L’intelligence humaine, par nature supérieure à l’intelligence animale, permet en effet à l’homme de domestiquer la nature pour améliorer sa vie animale. L’homme n’a pas seulement à maintenir en l’état l’ouvrage divin qui lui est confié, il doit aussi le développer et l’embellir. C’est ainsi, que le travail trouve sa dignité. Le travail n’est pas simplement un effort de survie ni une conséquence du péché originel. Même si l’on se place dans l’acception chrétienne, la conséquence du péché originel est dans la souffrance que peut occasionner le travail. En aucun cas le travail n’est une punition. Avant la chute, l’homme a le devoir de travailler à soumettre et faire prospérer la Création. Certes notre travail nous permet de vivre et nous fait ainsi accéder à l’autonomie, mais cela est aussi le fait des animaux qui multiplient les efforts, et parfois de façon très ingénieuse et industrieuse, pour se procurer les moyens de survivre ; il n’est qu’à regarder une fourmilière ou la hutte d’un castor. Notre travail nous nourrit, mais pourtant ce n’est pas sa fin première dans l’ordre de la dignité humaine. Il participe déjà à la dignité en donnant les conditions de vie biologique nécessaires à l’épanouissement de l’être. Rappelons-nous ici la découverte de saint Vincent de Paul : « Avant de penser à leur âme, donnons-leur ce qu’il faut pour qu’ils puissent prendre conscience qu’ils ont en une ». Mais ceci n’est qu’une condition préalable à l’épanouissement de la dignité humaine. L’être humain s’accomplit au-delà de cette simple nécessité biologique. Aussi son travail est-il un élément constitutif de sa dignité en ce sens qu’il est le moyen par lequel l’homme se distingue de l’animal

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