Avent – Benoît XVI explique le sens du mot “venue”

Avent – Benoît XVI explique le sens du mot “venue”

Chers frères et sœurs!

Avec cette liturgie des vêpres, nous commençons l’itinéraire d’une nouvelle année liturgique, en entrant dans le premier des temps qui la composent: l’Avent. Dans la lecture biblique que nous venons d’écouter, tirée de la Première Lettre aux Thessaloniciens, l’apôtre Paul utilise précisément ce terme: “venue”, qui en grec se dit “parusia” et en latin “adventus” (1 Ts 5, 23). Selon la tradition commune de ce texte, Paul exhorte les chrétiens de Thessalonique à demeurer irrépréhensibles “pour la venue” du Seigneur. Mais dans le texte original on lit “dans la venue” , comme si l’avent du Seigneur était, plus qu’un point du temps dans l’avenir, un lieu spirituel où cheminer déjà dans le présent, pendant l’attente, et au sein duquel être justement parfaitement gardés dans toutes nos dimensions personnelles. En effet, c’est précisément cela que nous vivons dans la liturgie: en célébrant les temps liturgiques, nous actualisons le mystère – dans ce cas-là, la venue du Seigneur – de manière à pouvoir, pour ainsi dire, “cheminer en elle” vers sa pleine réalisation, à la fin des temps, mais en puisant déjà sa vertu sanctificatrice, étant donné que les temps derniers ont déjà commencé avec la mort et la résurrection du Christ.

Le terme qui résume cet état particulier, où l’on attend quelque chose qui doit arriver, mais que dans le même temps l’on entrevoit et l’on pressent, est “espérance”. L’Avent est par excellence la saison spirituelle de l’espérance, et en lui, l’Eglise tout entière est appelée à devenir espérance, pour elle-même et pour le monde. Tout l’organisme spirituel du Corps mystique assume, pour ainsi dire, la “couleur” de l’espérance. Tout le peuple de Dieu se remet en chemin attiré par ce mystère: que notre Dieu est “le Dieu qui vient” et qui appelle à aller à sa rencontre. De quelle manière? Tout d’abord sous cette forme universelle de l’espérance et de l’attente qui est la prière, qui trouve son expression éminente dans les Psaumes, paroles humaines à travers lesquelles Dieu lui-même a placé et place continuellement sur les lèvres et dans le cœur des croyants l’invocation de sa venue. Arrêtons-nous donc quelques instants sur les deux Psaumes sur lesquels nous venons de prier et qui se suivent également dans le Livre biblique: le 141 et le 142, selon la numérotation juive.

“Seigneur, je t’appelle: accours vers moi! / Ecoute mon appel quand je crie vers toi! / Que ma prière devant toi s’élève comme un encens, / et mes mains comme l’offrande du soir” (Ps 141, 1-2). C’est ainsi que commence le premier psaume des premières vêpres de la première semaine du Psautier: des paroles qui, au début de l’Avent, prennent une nouvelle “couleur”, parce que l’Esprit Saint les fait résonner en nous toujours à nouveau, dans l’Eglise en chemin entre le temps de Dieu et le temps des hommes. “Seigneur… accours vers moi” (v. 1). C’est le cri d’une personne qui se sent en grave danger, mais c’est aussi le cri de l’Eglise parmi les multiples pièges qui l’entourent, qui menacent sa sainteté, cette intégrité irrépréhensible dont parle l’apôtre Paul, qui doit en revanche être conservée pour la venue du Seigneur. Et dans cette invocation résonne également le cri de tous les justes, de tous ceux qui veulent résister au mal, aux séductions d’un bien-être inique, de plaisirs qui offensent la dignité humaine et la condition des pauvres. Au début de l’Avent, la liturgie de l’Eglise fait à nouveau sien ce cri, et elle l’élève à Dieu “comme un encens” (v. 2). L’offrande des Vêpres de l’encens est en effet le symbole de la prière, de l’effusion des cœurs tournés vers Dieu, vers le Très-Haut, ainsi que “les mains que j’élève, en offrande du soir” (v. 2). Dans l’Eglise, l’on n’offre plus de sacrifices matériels, comme cela advenait également dans le temple de Jérusalem, mais on élève l’offrande spirituelle de la prière, en union avec celle de Jésus Christ, qui est dans le même temps Sacrifice et Prêtre de l’Alliance nouvelle et éternelle. Dans le cri du Corps mystique, nous reconnaissons la voix même de la Tête: le Fils de Dieu qui s’est chargé de nos épreuves et de nos tentations, pour nous donner la grâce de sa victoire.

Cette identification du Christ avec le Psalmiste est particulièrement évidente dans le deuxième Psaume (142). Ici, chaque parole, chaque invocation fait penser à Jésus dans la passion, en particulier à sa prière au Père sur le Gethsémani. Lors de sa première venue, à travers l’incarnation, le Fils de Dieu a voulu partager pleinement notre condition humaine. Naturellement, il n’a pas partagé le péché, mais pour notre salut il en a souffert toutes les conséquences. En priant le Psaume 142, l’Eglise revit chaque fois la grâce de cette compassion, de cette “venue” du Fils de Dieu dans l’angoisse humaine jusqu’à en toucher le fond. Le cri d’espérance de l’Avent exprime alors, dès le début et de la manière la plus forte, toute la gravité de notre état, notre besoin extrême de salut. Comme pour dire: nous attendons le Seigneur non à la manière d’une belle décoration sur un monde déjà sauvé, mais comme unique voie de libération d’un danger mortel. Et nous savons que Lui-même, le Libérateur, a dû souffrir et mourir pour nous faire sortir de cette prison (cf. v. 8).

Ces deux Psaumes nous mettent, pour ainsi dire, à l’abri de toute tentation d’évasion et de fuite de la réalité; ils nous préservent d’une fausse espérance, qui consisterait à entrer dans l’Avent et aller vers Noël en oubliant le caractère dramatique de notre existence personnelle et collective. En effet, une espérance fiable, qui ne soit pas trompeuse, ne peut qu’être une espérance “pascale”, comme nous le rappelle chaque samedi soir le cantique de la Lettre aux Philippiens, avec laquelle nous louons le Christ incarné, crucifié, ressuscité et Seigneur universel. Tournons vers Lui notre regard et notre cœur, en union spirituelle avec la Vierge Marie, Notre Dame de l’Avent. Plaçons notre main dans la sienne et entrons avec joie dans ce nouveau temps de grâce que Dieu offre à son Eglise, pour le bien de l’humanité tout entière. Comme Marie et avec son aide maternelle, soyons dociles à l’action de l’Esprit Saint, pour que le Dieu de la paix nous sanctifie pleinement, et que l’Eglise devienne signe et instrument d’espérance pour tous les hommes. Amen!

Benoît XVI, homélie des premières vêpres de l’Avent 2008

 

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