Edito #53 – Islam et catholicisme, même amour, même bonheur, même Dieu ?

Edito #53 – Islam et catholicisme, même amour, même bonheur, même Dieu ?

Le nouveau patron du parti au pouvoir, qui aime les petites phrases pouvant attirer sur lui l’attention, a donc voulu se coiffer de la casquette du théologien, déclarant que l’islam, était une religion d’amour et de bonheur, comme le catholicisme. Outre le fait qu’on se demande pourquoi, si le catholicisme est une religion d’amour et de bonheur, on la pourfend autant dans les milieux dont Monsieur Castaner est proche, il semble que la théologie musulmane de l’ancien porte-parole du gouvernement nécessite une petite mise au point. Il n’est du reste pas le seul à opérer de tels amalgames.

Curieusement, nous entendons de plus en plus de Chrétiens, parfois même de milieux considérés comme « tradi », affirmer que le dieu des Musulmans et celui des Chrétiens serait un seul et même Dieu. La référence la plus couramment citée provient de la déclaration de Paul VI, Nostra Aetate. Dans un raccourci, qui tire le texte bien au-delà de son propos, on lui fait affirmer que nous adorons en commun un même Dieu unique.

Or il n’en est rien, au contraire. Tout d’abord, il s’agit d’une déclaration du pape sur la question interreligieuse, dans la suite des textes conciliaires. Ce n’est en aucun cas un document dogmatique. Cela ne l’empêche pas de puiser à la source vive. Et la première chose qu’affirme le souverain pontife est la tâche de l’Eglise.

« Dans sa tâche de promouvoir l’unité et la charité de tous les hommes et même entre les peuples, elle examine ici ce que les hommes ont en commun et qui les pousse à vivre ensemble leur destinée. » (NA1)

Il s’agit ici de distinguer ce que les hommes ont en commun. Une telle démarche permet d’une part de distinguer ce qui unit, mais aussi ce qui sépare. Seul point de départ possible pour un dialogue fructueux.

Allant plus loin, Paul VI remarque que certains peuples, certaines cultures ont :

« une certaine sensibilité à cette force cachée qui est présente au cours des choses et aux événements de la vie humaine, parfois même une reconnaissance de la Divinité suprême, ou encore du Père. »(NA2)

L’Homme est capax Dei, capable de Dieu et nombre de non chrétiens ont un sentiment diffus et non nommé, moins encore identifié, du divin.

C’est ce que le pape entend lorsqu’il affirme plus loin,
« L’Eglise catholique ne rejette rien de ce qui est vrai et saint dans ces religions. (…) Elles apportent souvent un rayon de la vérité qui illumine tous les hommes. » Mais, il précise dans la suite immédiate, la limite absolue à cette reconnaissance. Reconnaître les éléments de vérité dans une doctrine ou une religion, ne signifie pas reconnaître l’intégralité des éléments de ces croyances et moins encore ces religions. Aussi précise-t-il « Toutefois, elle annonce et elle est tenue d’annoncer sans cesse, le Christ qui est « la voie, la Vérité et la vie » (Jn.14,6) dans lequel les hommes doivent trouver la plénitude de la vie religieuse et dans lequel Dieu s’est réconcilié toutes choses. » (ibid)
Il ne s’agit nullement pour le pape de mettre toutes les religions sur le même pied et moins encore d’envisager un quelconque syncrétisme. Au contraire, il invite à prendre chaque homme et chaque religion à partir de ces éléments de vérité pour les conduire à la vérité toute entière, en faisant « progresser les valeurs spirituelles, morales et socio-culturelles qui se trouvent en eux. » (ibid)

C’est à cette lumière qu’il faut lire le fameux paragraphe 3 sur l’Islam. Il n’est nullement dit que nous adorons le même Dieu. Le pape souligne les éléments de vérité dans l’Islam, à savoir que pour eux Dieu est unique, vivant, subsistant, tout puissant, créateur du ciel et de la terre, il a parlé aux hommes. A aucun moment le souverain pontife ne dit que ce dieu unique adoré par l’Islam est le Dieu de Jésus Christ. Mais il encourage les fidèles à partir de ces vérités partagées, pour conduire les Musulmans à la foi en ce Jésus qui pour nous est Dieu.

A partir de là, nous pouvons aussi voir ce qui différencie ce dieu de Mahomet de Yahvé. Entre toutes les différences, la nature même de la relation entre ce dieu et la race des hommes d’une part et entre le Dieu de Jésus Christ et les hommes d’autre part, est un gouffre qui touche non seulement la relation homme Dieu, mais la nature même de Dieu, les motifs de la Création et l’espérance en la vie éternelle.

L’Allah des musulmans ne cherche en aucune façon une relation intime et amoureuse avec les hommes, il veut des soumis. C’est bien ainsi que se nomment ses fidèles, musulman signifiant le soumis. Or ce type de relation ne peut s’entendre d’un Dieu qui a créé l’Homme par amour et se faisant Lui-même le bonheur ultime de l’Homme. Qu’il soit unique, créateur, tout puissant et vivant ne fait pas de cet Allah, le même Dieu que le Dieu de Jésus Christ.

La soumission qu’impose le dieu de l’islam se trouve même à l’opposé d’un Dieu venu libérer l’Homme du péché et par-dessus tout de l’emprise du démon. Que les musulmans « cherchent à se soumettre de toute leur âme aux décrets de Dieu, mêmes s’ils sont cachés », comme le souligne le pape, porte au crédit de la piété musulmane, la sincérité. Sincérité dont Dieu s’arrangera, lui qui seul sonde les reins et les cœurs. Mais cette sincérité ne doit pas masquer que cette piété si elle s’adresse in fine à Dieu, n’est pas formellement tournée vers Lui. Au contraire, elle sert un faux dieu qui se faisant passer pour Dieu manipule des fidèles par des préceptes contraires au bonheur de l’Homme qui pour aimer se doit d’abord d’être libre.

Fait-on plus grand fossé entre Yahvé qui libère et celui qui soumet ? Entre un Dieu qui cherche une relation à double sens avec l’Homme et une divinité qui n’attend qu’une relation à sens unique tournée vers elle ?

 

Pour aller plus loin :

Notre dossier spécial islam
Du curé enragé – Les conditions d’un vrai dialogue islamo-chrétien
L’islam, religion de paix ?
Livre – Comment parler de l’islam sans être taxé d’islamophobe ? En allant à la source, en partant du Coran…

 

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