Guillaume de Saint Thierry : colloque international du 4 au 7 juin 2018 à Reims (51)

Guillaume de Saint Thierry : colloque international du 4 au 7 juin 2018 à Reims (51)

Dans le cadre des manifestations liées au 50ème anniversaire de la reprise de la vie monastique sur la colline du Mont d’Hor à Saint Thierry et 20 ans après le dernier colloque francophone consacré à Guillaume de Saint Thierry, un nouveau colloque international aura lieu du :

lundi 4 au jeudi 7 juin 2018
A la Maison saint Sixte 6, rue du Lieutenant Herduin à Reims (4-6 juin)
et au Monastère des Bénédictines de Saint Thierry (7 juin)

Sur le thème :

“Guillaume de Saint Thierry : histoire, théologie, spiritualité”

 

Abbé bénédictin de l’Abbaye de Saint Thierry au 12ème siècle, devenu cistercien à la fin de sa vie, grand ami de Saint Bernard de Clairvaux, il est né à Liège en 1075 et est décédé le 8 septembre 1148 à l’abbaye de Signy. Ce théologien et mystique du XIIème siècle fut un adversaire de la philosophie rationaliste médiévale.

Organisé par “Sources Chrétiennes” et l’Université de Reims, ce colloque se déroulera à la Maison diocésaine Saint Sixte (6, rue du Lieutenant Herduin à Reims) du 4 au juin et au Monastère des Bénédictines de Saint Thierry, le 7 juin. Excursions à la Chartreuse du Mont Dieu, à Charleville-Mézières et à Signy l’Abbaye. Un concert est également prévu au Monastère de Saint Thierry.

Ce colloque réunira des spécialistes internationaux de son œuvre et de l’histoire du XIIème siècle cistercien.

Organisateurs : Patrick Demouy (Université de Reims Champagne-Ardenne) et Laurence Mellerin (Sources Chrétiennes, HiSoMA).

Si vous désirez participer à ce colloque, INSCRIPTION OBLIGATOIRE : http://www.sourceschretiennes.mom.fr/webform/inscription-colloque-guillaume-saint-thierry

Hébergement possible au Monastère de Saint Thierry : 20 € / nuitée + petit-déjeuner, dans la limite des places disponibles. Cet hébergement nécessite d’avoir un véhicule pour rejoindre Reims, car le monastère est à environ 25 mn en voiture de la Maison Saint-Sixte où se déroulent les deux première journées du colloque.

Contacter directement la Sœur hôtelière : [email protected]http://www.benedictines-ste-bathilde.fr/-Saint-Thierry-

Renseignements : [email protected][email protected]

 

Le rayonnement de Guillaume de Saint-Thierry, dans les Ardennes, en Champagne et en Belgique, mais aussi bien au-delà, n’est plus à démontrer : deux grands colloques ont déjà été organisés en France, respectivement en 1976 à Saint-Thierry et en 1998 à Signy, pour mieux découvrir, outre l’archéologie de ses lieux de vie, sa personnalité et sa théologie.

Depuis cette date, l’édition de ses œuvres a progressé, puisque nous disposons aujourd’hui de textes critiques de qualité dans le Corpus Christianorum Continuatio Mediaevalis ; des traductions dans les grandes langues européennes ont été réalisées. En français, la plupart des textes sont parus dans la collection “Sources Chrétiennes”, et l’édition de tous ceux qui manquent encore est actuellement en chantier, laissant envisager la mise à disposition des Œuvres complètes en français à l’horizon de 2020. De nombreuses études consacrées à Guillaume ont également vu le jour : citons entre autres, dans le seul domaine francophone, les études de M. Rougé, Doctrine et expérience de l’eucharistie (1999) ; de M. Desthieux, Désir de voir Dieu et amour chez Guillaume de Saint-Thierry (2006) ; de D. Cazes, La théologie sapientielle de Guillaume de Saint-Thierry (2009). Il est temps, vingt ans après le colloque de Signy, de faire le point sur les avancées réalisées, les zones d’ombre qui demeurent, et d’ainsi accompagner l’achèvement de la publication des œuvres.

La biographie de Guillaume est désormais mieux établie, mais il convient d’approfondir l’enquête en ce qui concerne ses années de formation, de Liège à l’abbaye Saint-Nicaise, et l’histoire des monastères bénédictins rémois au XIIème siècle. La publication en français des documents relatifs au chapitre de 1131 permettra de revenir plus précisément sur son rôle d’abbé bénédictin et ses ambitions réformatrices au sein de l’ordre des moines noirs.

Ses relations avec Bernard de Clairvaux méritent aussi d’être encore examinées : faut-il réévaluer la figure de Guillaume, conseiller théologique de l’ombre ? Dans la spiritualité cistercienne, on avait coutume d’opposer l’intellectuel Guillaume au docteur de l’amour Bernard. Grâce aux colloques récents consacrés à Saint Bernard, il convient d’affiner cette perspective, et aussi de situer Guillaume par rapport à l’«intellectuel» Isaac de l’Étoile. Dans l’histoire de la spiritualité cistercienne d’une manière générale, ne faudrait-il être plus prudent avec les appellations ?

Par ailleurs, le rapport de Guillaume aux écoles de son temps, et sa connaissance des méthodes et controverses nouvelles, laissent encore ouvertes bien des questions : la parution dans “Sources Chrétiennes” de la Disputatio, inédite en français jusqu’ici, sera l’occasion de les reprendre. Les études abélardiennes ayant également beaucoup évolué ces dernières années, il faudra relire les écrits polémiques de Guillaume à la lumière d’une connaissance renouvelée de son adversaire.

Ajoutons que l’on manque d’une vue synthétique sur l’utilisation de la Bible par Guillaume : l’analyse des données préparées sur l’ensemble de son œuvre pour Biblindex, index en ligne des citations bibliques dans la littérature patristique, la rendra possible, et le colloque examinera aussi tout spécialement le Commentaire sur l’Eître aux Romains récemment publié en français.

Enfin, le colloque fera aussi une place aux sujets plus usuellement traités, car leur richesse les rend inépuisables : les sources de la pensée de Guillaume, ses lectures ; sa spiritualité et en particulier son interprétation du Cantique ; la postérité de sa théologie et de sa mystique, … Une section pourra de nouveau être consacrée à la question de ses méthodes de travail.

La synthèse bibliographique réalisée par B. Pennington puis P. Verdeyen jusqu’en 1998 sera réactualisée : le projet d’un carnet de recherche en ligne, dédié à Guillaume, sera évoqué.

 

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Catéchèse du Pape Benoît XVI consacrée à Guillaume de Saint Thierry lors de l’Audience générale du 2 décembre 2009 :

Issu d’une famille noble, doté d’une vive intelligence et d’un amour inné pour l’étude, il fréquenta de célèbres écoles de l’époque, comme celle de sa ville natale et de Reims, en France. Il fut personnellement en contact avec Abélard, le maître qui appliquait la philosophie à la théologie de manière si particulière qu’il en suscitait bien des perplexités et des oppositions ; Guillaume lui-même exprima des réserves, demandant à son ami Bernard de prendre position par rapport à Abélard. Par ailleurs, en réponse à ce mystérieux et irrésistible appel de Dieu qu’est la vocation à la vie consacrée, Guillaume entra au monastère bénédictin de Saint-Nicaise à Reims en 1113, et quelques années plus tard devint abbé du monastère de Saint-Thierry, dans le même diocèse. C’était un temps où était largement ressentie l’exigence d’une purification et d’une rénovation de la vie monastique pour qu’elle redevienne plus authentiquement évangélique. Guillaume œuvra dans ce sens à l’intérieur de son propre monastère et, plus généralement, dans l’Ordre bénédictin. Mais il rencontra tellement de résistances à ses tentatives de réforme, que, en 1135, malgré les conseils contraires de son ami Bernard, il quitta l’abbaye et troqua l’habit noir des bénédictins pour l’habit blanc des cisterciens qu’il rejoignit à l’abbaye de Signy, toujours dans le même diocèse. À partir de ce moment jusqu’à sa mort en 1148, il allait se livrer à la contemplation priante des mystères de Dieu, depuis toujours objet de ses plus profonds désirs, et à la composition d’écrits de littérature spirituelle, importants dans l’histoire de la théologie monastique.

Une vocation radicale à l’amour

L’une de ses premières œuvres s’intitule De natura et dignitate amoris («De la nature et dignité de l’amour»). Guillaume y exprime une de ses idées fondamentales, valable pour nous aussi : l’énergie principale qui anime l’esprit de l’homme est l’amour, dit-il. La nature humaine consiste, dans son essence la plus profonde, à aimer. En définitive, il n’y a qu’un seul devoir qui s’impose à tout être humain : apprendre à aimer, à aimer bien, sincèrement, authentiquement, gratuitement. Mais ce n’est qu’à l’école de Dieu que l’homme peut accomplir ce devoir et atteindre la fin pour laquelle il a été créé. Guillaume écrit en effet : «L’art des arts est l’art de l’amour […]. L’amour est suscité dans la nature par le Créateur. L’amour est une force de l’âme qui la conduit comme par un poids naturel au lieu et au but qui lui reviennent» (op. cit., 1 ; Patr. lat. 184, 379). Apprendre à aimer ne se fait que tout au long d’un cheminement exigeant, que Guillaume articule en quatre étapes correspondant aux périodes de la vie de l’homme : l’enfance, la jeunesse, la maturité et la vieillesse. Sur cet itinéraire, une personne doit s’imposer une ascèse efficace, une stricte maîtrise de soi-même, afin d’éliminer toute affection désordonnée, toute concession à l’égoïsme, et d’unifier sa propre vie en Dieu, source, but et force de l’amour, jusqu’à atteindre le sommet de la vie spirituelle défini par Guillaume comme «sagesse». À la fin de cet itinéraire ascétique, on fait l’expérience d’une grande sérénité et douceur. Toutes les facultés de l’homme, intelligence, volonté et sensibilité, se reposent alors en Dieu, connu et aimé dans le Christ.

Dans d’autres œuvres encore, Guillaume parle de cette vocation radicale à l’amour pour Dieu qui constitue le secret d’une vie réussie et heureuse et qu’il décrit comme un désir incessant et toujours croissant, que Dieu lui-même inspire au cœur de l’homme. Dans une méditation, il dit que l’objet de cet amour est l’Amour, avec un A majuscule, c’est-à-dire Dieu. C’est lui qui, en retour, se répand dans le cœur de celui qui l’aime, et le rend capable de le recevoir. Il se donne à satiété, et d’une manière telle que le désir n’est jamais amoindri par cette satiété. Cet élan d’amour est l’accomplissement de l’homme (De contemplando Deo 6, passim ; Sources chrét. 61bis, p. 76-83). Un fait est frappant : Guillaume, lorsqu’il parle de l’amour envers Dieu, accorde une grande importance à la dimension affective. Au fond, chers amis, notre cœur est fait de chair, et quand nous aimons Dieu, qui est l’Amour même, comment ne pas exprimer aussi dans cette relation avec le Seigneur ce qu’il y a de plus humain dans nos sentiments, comme la tendresse, la sensibilité, la délicatesse ? Le Seigneur lui-même, en se faisant homme, a voulu nous aimer avec un cœur de chair !

On ne connaît Dieu qu’en l’aimant

Autre point encore. Selon Guillaume, l’amour a une autre propriété importante : il illumine l’intelligence et il permet de mieux connaître Dieu, et de manière plus profonde et en Dieu, les personnes et les événements. Si la connaissance qui procède des sens et de l’intelligence réduit la distance entre le sujet et l’objet, entre le moi et le toi, elle ne l’élimine pas pour autant. Au contraire, l’amour produit l’attraction et la communion, jusqu’à ce qu’il y ait une transformation et une assimilation entre le sujet qui aime et l’objet aimé. Cette réciprocité d’affection et de sympathie permet alors une connaissance bien plus profonde que celle opérée par la seule raison. Ainsi s’explique une expression célèbre de Guillaume : «Amor ipse intellectus est. Déjà en soi l’amour est principe de connaissance». Chers amis, nous pouvons nous demander : n’est-ce pas ainsi qu’est notre vie ? N’est-il pas vrai que nous connaissons réellement seulement ceux et ce que nous aimons ? Sans une certaine sympathie on ne connaît personne ni rien ! Cela vaut par dessus tout pour la connaissance de Dieu et de ses mystères, qui surpassent la capacité de compréhension de notre intelligence : Dieu, on le connaît si on l’aime !

Guillaume de Saint-Thierry synthétisa sa pensée dans une longue lettre adressée aux chartreux voisins, ceux de Mont-Dieu, auprès de qui il s’était rendu pour une visite d’encouragement et de réconfort. Dès 1690, le savant moine bénédictin Jean Mabillon allait donner à cette lettre le titre significatif de Epistola aurea («Lettre d’or») ; et, en effet, les enseignements qui y sont donnés sur la vie spirituelle sont précieux à tous ceux qui désirent croître dans la communion avec Dieu, croître en sainteté. Dans ce traité, Guillaume propose un itinéraire en trois étapes. Il convient, dit-il, de passer de l’«homme animal» à l’«homme rationnel» pour s’approcher de l’«homme spirituel». Que veut dire notre auteur avec ces trois expressions ? Pour débuter, par un acte d’obéissance et de confiance, une personne accepte la vision de la vie que lui inspire la foi. Puis, en un processus d’intériorisation où la raison et la volonté jouent un grand rôle, la foi dans le Christ est accueillie avec une conviction profonde, et l’homme fait l’expérience d’une correspondance harmonieuse entre, d’une part, ce qui est cru et espéré et, d’autre part, les aspirations les plus secrètes de son âme, de sa raison, de ses sentiments. On atteint alors la perfection de la vie spirituelle lorsque les réalités de la foi sont source de joie intime et de communion réelle et apaisante avec Dieu. On ne vit plus que dans l’amour et par l’amour. Guillaume trace cet itinéraire sur la base d’une vision solide de l’homme inspirée des anciens Pères grecs, spécialement d’Origène, lesquels, en un langage audacieux, avaient professé que la vocation de l’homme est de devenir comme Dieu, qui l’a créé à son image et à sa ressemblance. L’image de Dieu présente en l’homme l’entraîne vers la ressemblance, c’est-à-dire vers une identité toujours plus entière entre sa volonté et la volonté divine. On atteint cette perfection, que Guillaume appelle «unité d’esprit», non pas par un effort personnel, aussi pur et généreux soit-il, parce qu’une autre chose encore est nécessaire : cette perfection est atteinte sous l’action du Saint-Esprit qui fait sa demeure dans l’âme, purifie, absorbe et transforme en charité tout élan et tout désir d’amour présents en l’homme. Nous lisons dans l’Epistola aurea : «Il existe aussi une autre ressemblance avec Dieu, que l’on ne peut plus appeler ressemblance mais unité d’esprit, lorsque l’homme devient un avec Dieu, non seulement par l’unité d’un vouloir identique, mais par l’impossibilité de vouloir autrement. Par cela, l’homme mérite de devenir non pas Dieu mais ce que Dieu est : par grâce l’homme devient ce qu’est Dieu par nature» (Epistola aurea 262-263 ; Sources chrét. 223, p. 353-355).

Chers Frères et Sœurs, cet auteur, que l’on pourrait définir comme «Chantre de l’amour, de la charité», nous enseigne à faire dans notre vie le choix fondamental, celui qui donne sens et valeur à tous les autres choix ; aimer Dieu et, pour son amour, aimer notre prochain ; ainsi seulement pourrons-nous rencontrer la vraie joie, avant-goût de la béatitude éternelle. Mettons-nous donc à l’école des saints pour apprendre à aimer authentiquement et totalement, pour entrer dans cet itinéraire de notre être. Avec une jeune sainte, Docteur de l’Église, Thérèse de l’Enfant-Jésus, disons au Seigneur, nous aussi, que nous voulons vivre d’amour. C’est donc par une prière de cette sainte que je conclurai : «Ah ! Tu le sais, Divin Jésus, je t’aime. L’Esprit d’amour m’embrase de son feu ! C’est en t’aimant que j’attire le Père, mon faible cœur le garde sans retour. Ô Trinité ! Vous êtes prisonnière de mon Amour ! Vivre d’Amour, c’est donner sans mesure, sans demander de salaire ici-bas. Ah ! sans compter je donne, étant bien sûre que lorsqu’on aime on ne calcule pas. Au Cœur divin, débordant de tendresse, j’ai tout donné … Légèrement je cours. Je n’ai plus rien que ma seule richesse : vivre d’Amour».

Source La Croix

 

Télécharger le programme complet du colloque :

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