L’adoration des Quarante-Heures : une belle tradition avant le mercredi des Cendres

L’adoration des Quarante-Heures : une belle tradition avant le mercredi des Cendres

Lu sur le site de la Schola Sainte Cécile

On désigne sous le terme de Quarante-Heuresune supplication instante par laquelle on implore Dieu en se relayant dans l’adoration du Saint Sacrement exposé avec solennité 40 heures durant. Cette supplication a lieu le plus souvent et par tradition pendant les heures qui précèdent l’ouverture du Carême, du dimanche de la Quinquagésime au mardi avant les Cendres, mais peut se faire à d’autres moments de l’année.

HISTOIRE – Durant la Semaine Sainte, les fidèles veillaient dans les églises auprès de la représentation du sépulcre du Christ, depuis sa mort – à none du Vendredi Saint – jusqu’à sa résurrection, que la liturgie marquait par la procession pascale au petit matin de Pâques, soit environ 40 heures. Dans beaucoup d’endroits, le clergé ensevelissait le Corps du Christ en mettant une hostie dans le tombeau après la messe des Présanctifiés le Vendredi Saint, et c’est cette hostie qui était retirée du tombeau et conduite solennellement en procession pour être ramenée triomphalement à l’autel au matin de Pâques. Ce chiffre symbolique de 40 heures passées par le Christ dans la mort remonte à une haute tradition, il est déjà rapporté par saint Augustin (De Trinitate IV, 6 : Ab hora ergo mortis usque ad diluculum resurrectionis horæ sunt quadraginta, ut etiam ipsa hora nona connumeretur. Cui numero congruit etiam vita ejus super terram post resurrectionem in quadraginta diebus. Rappelons que la manière antique de décompter les heures ne correspond pas à notre pratique actuelle d’heures fixes de 60 minutes).

Machine des Quarante-Heures - église de Bottanuco.

Les Quarante-Heures – église de Bottanuco.

Cette vénération du Christ au tombeau – qui de fait, dans de larges parties de l’Europe médiévale, était aussi une véritable garde du Corps eucharistique au tombeau en attente de la résurrection – fut reprise à compter du XVIèmesiècle en dehors de la Semaine Sainte, en réponse aux négations protestantes de la présence réelle du Christ dans la sainte hostie hors de la messe.

Les Quarante-Heures – en tant que supplication exceptionnelle – virent le jour en effet à Milan en 1527, dans un contexte de guerres & de calamité (sac de Rome & invasion française du Milanais). Elles y furent instituées par Jean-Antoine Bellotti au début de chaque trimestre, et ce jusqu’en 1529. En 1537, le capucin milanais Giuseppe da Ferno les reprends et en fait une chaîne de prières solennelles avec procession eucharistique : lorsque une paroisse terminait ses Quarante-Heures, une autre prenait la relève, de sorte que le Saint Sacrement était adoré de façon perpétuelle (cette pratique est à l’origine de l’adoration perpétuelle). Saint Antoine-Marie Zaccaria (1502 † 1539), fondateur, à Milan toujours, des Clercs réguliers de saint Paul (ou Barnabites) les propage ardemment.

Les Quarante-Heures à Arrone en Italie.

Les Quarante-Heures à Arrone en Italie.

Les Capucins et les Barnabites contribuent rapidement à diffuser les Quarante-Heures en dehors de Milan. Giuseppe da Ferno les fait connaître, lors de ses missions des années 1537-1539 à Pavie, Sienne, Arezzo, son confrère François de Soriano les acclimate en Ombrie. En 1550, saint Philippe Néri les introduit à Rome et prend coutume de les organiser au début de chaque mois dans les différentes églises de confréries qu’il anime, dont celle de la Très-Sainte-Trinité-des-Pèlerins. A Messine, assiégée par les Turcs en 1552, ce sont les Jésuites qui les organisent pour demander et obtenir la libération de la ville. A partir de 1556, l’ordre des Jésuites prend l’habitude de faire la prière des Quarante-Heures du dimanche de la Quinquagésime au mardi avant les Cendres, pour expier les fautes qui se commettent durant la période du Carnaval.

Machine des Quarante-Heures de l'église de Bienno, Italie.

Machine des Quarante-Heures de l’église de Bienno, Italie.

En 1575, l’archevêque de Milan saint Charles Borromée, dans une lettre pastorale d’une éloquence admirable sur la sainteté du temps de la Septuagésime, déplore le malheur des chrétiens relâchés qui emploient si mal ces jours précieux, durant lesquels ils devraient s’appliquer spécialement à la prière et aux bonnes œuvres. A cet effet, saint Charles règle l’organisation des Quarante-Heures dans le plus grand diocèse d’Europe qu’il dirige : on exposera le Saint Sacrement les trois jours précédant le Carême, dans la cathédrale de Milan, et dans trente autres églises de la ville ; le matin et le soir il y aura procession solennelle, et MM. les Curés distribueront les heures de la journée à leurs paroissiens, de manière à ce qu’il y eût toujours un nombre assez considérable d’adorateurs devant le Très-Saint Sacrement.

Machine des Quarante-Heures de la paroisse de Colere - Italie.

Machine des Quarante-Heures de la paroisse de Colere – Italie.

Le 25 novembre 1592, le pape Clément VIII, par la Constitution Graves & diuturnæ, organise les Quarante-Heures dans la Ville de Rome à la manière de ce qu’avait fait précédemment Giuseppe da Ferno : de manière continue, les prières commençant dans telle église romaine au moment où elle se terminaient dans telle autre. En les instituant, le Pape demandait que la prière des Quarante-Heures soit alors effectuée pour 3 intentions :
1. pour le salut du royaume de France, alors déchiré par la succession d’Henri III,
2. pour la victoire de la Chrétienté contre les Turcs,
3. pour l’unité de l’Eglise.
Le Pape démarra cette chaîne de prières le 30 novembre 1592 à la Chapelle Sixtine.

Le pape Clément XI (1700 † 1721), publia le 21 janvier 1705 diverses directives pour le maintien de cette observance dans les églises de Rome.

Machine des Quarante-Heures napolitaine.

Machine des Quarante-Heures napolitaine.

Mais c’est surtout le pape Clément XII (1730 † 1740) qui les republia le 1erseptembre 1731, sous la forme d’une instruction en italien, l’Instruction clémentine, qui fixe le cadre liturgique des supplications des Quarante-Heures dans les église romaines. L’Instruction clémentine n’était – à strictement parler – rigoureusement obligatoire que dans la Ville éternelle, mais les règles générales qu’elle a édictées ont valeur partout, en vertu des rubriques et des décisions de la Sacré Congrégation des Rites (n. 2403). C’est, dit Stercky, « un excellent traité de l’exposition du Saint-Sacrement » auquel il est louable de se rapporter et de se conformer dans tous les diocèses du rit romain.

Mandement du cardinal de Noailles en 1725 pour les Quarante-Heures à Paris. Le télécharger.

Mandement du cardinal de Noailles en 1725 pour les Quarante-Heures à Paris.
Le télécharger.

LES QUARANTE-HEURES EN FRANCE – La France ne fut pas en reste de l’Italie, car dès 1574 un Jésuite, le R.P. Auger, avait obtenu de l’Archevêque de Paris que les Quarante-Heures soient organisées dans toutes les églises de notre capitale, malgré la forte opposition alors du curé de Saint-Eustache. De Paris, la supplication des Quarante-Heures se répandit rapidement dans toute la France. On les note à Rouen en 1584 et 1589, à l’Isle-sur-Sorgue & à Lyon en 1593, à Avignon en 1596, à Annemasse en 1597, à Thonon en 1598, à Marseille en 1599, à Gap en 1604, etc… Les Quarante-Heures sont célébrées très solennellement dans le cadre de missions de prédications, à l’initiative des Capucins, pour faire revenir à l’Eglise les fidèles égarées par le protestantisme, et soutenir et confirmer la foi des néophytes. Les Quarante-Heures deviennent dans notre pays une véritable « machine de guerre » de la Contre-Réforme catholique, déplaçant de grandes foules (100 000 personnes à Gap en 1618 par exemple) et réalisant de nombreuses conversions, par la convocation de tous les arts (des décors extraordinaires et des musiques magnifiques sont mis en place à chaque fois) pour exalter la Sainte Eucharistie.

Par le Bref Sacri apostolatus ministerio, le Pape Grégoire XV (qui régna de 1621 à 1623) exhorte les archevêques et évêques de France à organiser partout des prières des Quarante-Heures pour le « succès des entreprises royales contre les hérétiques du royaume, l’extirpation des hérésies & l’exaltation et la paix de notre Sainte Mère l’Eglise ». Ce bref accordait déjà une indulgence plénière aux fidèles français qui, après s’être confessés et avoir communié, priaient aux intentions du Souverain Pontife (cette indulgence est générale pour tout l’univers catholique depuis Pie XI en 1931). Peu après, en 1625, le pape Urbain VIII donna de plus aux capucins français (puis à d’autres ordres missionnaires), lorsqu’ils confessaient dans le cadre des Quarante-Heures, d’amples facultés d’absolution réservées ordinairement aux évêques, ce qui ne contribua pas peu aux succès des nombreuses missions capucines – toujours assorties de Quarante-Heures magnifiques – tout au long du XVIIème siècle dans notre pays (les fidèles préféraient venir en masse se confesser à des missionnaires de passage plutôt qu’à leur curé, qui – pour les cas réservés à l’évêque – ne pouvaient leur donner l’absolution !).

En 1617, à Cahors, la foule de ceux qui voulaient assister aux Quarante-Heures célébrées à l’église des Jésuites fut si nombreuse que cela entraina des émeutes. A Gap en 1628, où les Quarante-Heures enregistrèrent l’abjuration de 1500 protestants, des « hérétiques qui venaient des plus hautes montagnes du Dauphiné, entrant dans l’église et la voyant parée en si grande pompe et magnificence, éclairée avec tant de lumières pour honorer le Très-Saint Sacrement qui était exposé en évidence, se mettaient d’abord à genoux, croyant d’être dans le Paradis et disaient tout haut : Vive l’Eglise romaine qui est si magnifique et non pas le temple des ministres qui semblent des étables à bêtes » (Archives départementales des Hautes-Alpes, 3H2, 1, p. 89, cité in Bernard Dompnier, Un aspect de la dévotion eucharistique dans la France du XVIIe siècle : les prières des Quarante-Heures, Revue d’histoire de l’Eglise de France, 1981, Vol. 67, n°178, p. 17)

Si les Quarante-Heures étaient célébrées toute l’année pendant les missions capucines, comme en Italie, on en vint assez rapidement à les célébrer à la Quinquagésime, pour les 3 derniers jours avant le Carême. A Paris, l’église Saint-Nicolas-du-Chardonnet se met à célèbrer annuellement les Quarante-Heures à la Quinquagésime dès l’année 1616. Des actes de fondation établis entre 1628 et 1637 dans cette paroisse indiquent que les Quarante-Heures y étaient un grandiose préambule du Carême, assorti d’une invitation à la confession & à la communion. Ces actes décrivent assez bien comment se déroulaient alors ces supplications solennelles à Saint-Nicolas-du-Chardonnet : les sonneries des cloches devaient se faire comme au jour de première classe, le maître-autel devait être décoré de reliquaires, tableaux, d’un grand nombre de cierges « et autres ornements pieux & sacrés », « le tout avec l’appareil, ornements, cérémonies & solennité de fête solennelle comme du propre jour de la Fête-Dieu voire et au-delà autant que faire se peut. » La province des Capucins de Paris décide elle aussi d’organiser ses Quarante-Heures à la Quinquagésime dès 1621-1622. Mais ce furent les Jésuites français – et saint Jean-François Régis (1597 † 1640) tout particulièrement – qui généralisèrent dans notre pays l’usage italien de leur compagnie de faire les Quarante-Heures à la Quinquagésime en préambule du Carême.

1956 - Les Quarantes-Heures au sanctuaire de San Francesco de Geronimo.

1956 – Les Quarantes-Heures au sanctuaire de San Francesco de Geronimo.

La révolution française porta dans notre pays un coup certain aux Quarante-Heures, et il semble que l’usage de les faire soit devenu moins usuel au cours du XIXèmesiècle. Un indice de cette désaffection se rencontre dans les différents cérémoniaux et manuels de liturgie publiés au cours de ce siècle en France, où l’on ne trouve qu’exceptionnellement une description des cérémonies des Quarante Heures. La Semaine Religieuse du diocèse de Lyon constate ainsi en 1911 que « dans notre diocèse, il n’est guère possible d’observer à la lettre l’Instruction Clémentine, et de faire les Quarante-Heures sans interruption aucune de jour ni de nuit » (p. 218). Il est probable que la Seconde guerre mondiale porta un coup encore plus fatal à cette tradition, qui est demeurée pourtant vivace jusqu’aujourd’hui au Royaume Uni et en Italie, y compris dans le nouveau rit.

LA MACHINE DES QUARANTE-HEURES – Pour rehausser la solennité de l’exposition du Saint Sacrement durant les Quarante-Heures, la piété des fidèles, alliée à tout le génie décoratif de l’âge baroque, conçut de grandes construction temporaires afin d’y placer un trône élevé pour l’ostensoir, orné de très nombreux candélabres. Ces constructions temporaires pour les 3 jours de l’exposition reçurent le nom de « Machine des Quarante-Heures » (« Macchine delle Quarantore » en italien). La première machine semble avoir été conçue par les Jésuites de Rome. Les plus grands architectes et artistes collaborent à leurs réalisations, qui témoignent de l’extraordinaire piété de nos pères. Nicolas Poussin reçoit ainsi en 1633 la commande du Repos pendant la fuite en Egypte et de l’Adoration des Mages pour orner les Quarante-Heures d’un oratoire romain.

Voici la machine dessinée en 1650 pour les supplications des Quarante-Heures des Jésuites à l’église du Gesù de Rome :

Dessin de la machine des Quarante Heures en 1650 dans l'église jésuite du Gesù à Rome

Voici une gravure représentant le Pape Pie VI en adoration du Saint Sacrement disposé sur l’extraordinaire machine des Quarante-Heures conçue par le Bernin lui-même pour le Vatican :

Machine des Quarante-Heures pour le Vatican conçue par le Bernin - gravure de Desprez

Louis-Jean Desprez (Auxerre, 1743 – Stockholm, 1804) et Francesco Piranesi (Rome, 1758/9 – Paris, 1810) – « Pie VI en adoration dans la Chapelle Pauline pendant la cérémonie des Quarante Heures », vers 1783-1785. Aquarelle et gouache (Desprez) sur traits gravés (Piranese). Source : La Galerie Tarantino, que nous remercions vivement ici pour cette aide iconographique.

Voici encore quatre dessins de machines des Quarante-Heure du XVIIème siècle :

  • Le premier porte une indication manuscrite indiquant que la machine comportait 140 lumières
  • Le second est un projet de décor des Quarante-Heures. Rome, fin du XVIIème siècle. Source : Galerie Tarantino.
  • Le Troisième est un projet de décor pour les Quarante-Heures figurant le « Retour des explorateurs du pays de Canaan » par Giacinto Calandrucci (élève de Maratta), vendu à la National Gallery de Washington (lesdits explorateurs avaient passés 40 jours à explorer Canaan).
  • Beneduci di Orzinuovi – dessin d’une machine des Quarante-Heures.

Voici une vidéo de la machine des Quarante-Heures de l’église Santa Maria dell’Orto à Rome, toujours en usage (mais pour le reposoir du Jeudi Saint). Exécutée en 1848, elle comporte 231 cierges. Elle est l’oeuvre d’un certain Luigi Clementi, et a coûté, selon les archives, 500 écus pour le travail du bois et 50 autres pour la dorure.

SYMBOLISME DU NOMBRE 40 – Le nombre 40 se retrouve de très nombreuses fois dans l’Ecriture, où souvent, il est en relation avec la rencontre avec Dieu. En voici les principales occurrences. Ainsi :

REGLES LITURGIQUES – Les supplications des Quarante Heures sont régies par l’Instruction clémentine, promulguée en 1731 par le pape Clément XII à partir d’une première publication réalisée par le pape Clément XI en 1705. Ce document est cité en neuvième lieu dans la liste officielle des livres liturgiques de l’Eglise romaine (Sacré Congrégation des Rites, n°4266 du 17 mai 1911). Nous sommes heureux de vous offrir en téléchargement cette instruction sur notre site :

L’Instruction est divisée en 37 paragraphes dont le cadre nous fournira une présentation succincte des règles liturgiques pour la célébration des Quarante-Heures :

Les Quarante-Heures à l'Oratoire de Londres

Les Quarante-Heures à l’Oratoire de Londres

Règles générales

  • Un signe extérieur (un écu ou une bannière) doit être apposé auprès de la porte principale de l’église où le Saint-Sacrement est exposé solennellement. Ce signe doit comporter un symbole du Saint Sacrement, afin que le peuple sache que les Quarante-Heures se déroulent dans cette église.
  • L’autel où a lieu l’exposition ne doit présenter aucune relique de saints ni de symboles funèbres. Il est régulièrement le maître-autel de l’église. Si une peinture figure sur le retable de cet autel, elle doit être recouverte d’un tissu blanc ou rouge. De même pour les statues de saints qui orneraient l’autel (mais pas celles d’anges tenant des candélabres).
  • Sur l’autel doit être placé un trône élevé où sera placé l’ostensoir renfermant le Saint Sacrement. Des draperies blanches (galonnées d’or précise Barbier de Montault) formant dais ou baldaquin pourront être disposées, en particulier si le trône n’est pas couvert.
  • Les parements & la décoration de l’autel doivent être de couleur blanche et ne pas cacher l’ostensoir.
  • On ne placera jamais de fleurs devant le tabernacle. Les fleurs ne sont pas prohibées mais doivent rester discrètes. A Rome, on n’en met pas.
  • De jour comme de nuit, il convient qu’un minimum de 20 cierges brûlent en permanence à cet autel.
  • On ne placera pas de luminaire derrière l’hostie pour tenter de la faire briller.
  • Les fenêtres de l’église proches de l’autel de l’exposition pourront être occultées, l’idéal étant de faire briller les cierges de l’autel au milieu des ténèbres, afin de favoriser la concentration et la prière.
  • Un banc pour s’agenouiller est préparé et sera placé pour l’adoration du clergé au bas des marches de l’autel d’exposition une fois la messe d’exposition et sa procession finies. Ce banc pourra être couvert de rouge ou de vert.
  • La réserve eucharistique – si elle est conservée habituellement à l’autel de l’exposition – devra être placée à un autre autel. En tout état de cause, la communion ne pourra jamais être reçue à l’autel de l’exposition.
  • Les cloches doivent sonner avec solennité la veille du début de l’exposition à l’Angelus, puis une demi-heure avant le coucher du soleil et une heure après celui-ci. Durant l’exposition, les cloches de l’église doivent sonner chaque heure, de nuit comme de jour.
  • Le Saint Sacrement ne devra pas être visible de la rue durant l’adoration (pour éviter les blasphèmes, en particulier pendant le temps de Carnaval). Un drap devra être tendu au niveau de la porte d’entrée, si nécessaire, pour occulter la vue de l’autel de l’exposition depuis la rue.
  • Si les Quarante-Heures se tiennent de coutume à partir du dimanche de la Quinquagésime, on peut aussi les pratiquer toute l’année sauf durant le Triduum pascal où elles sont bien sûr interdites. Cependant, si pendant que durent les Quarante-Heures, devaient avoir lieu la bénédiction des cierges et la procession de la Chandeleur, la distribution des Cendres du Mercredi saint, la bénédiction et la procession des Rameaux, l’exposition du Saint Sacrement devrait être interrompue durant la durée de ces cérémonies et reprendraient après elles. Des règles spécifiques existent également dans le cas où les Quarante-Heures comprennent le 2 novembre.

Tenues des clercs & des laïcs

  • Deux membres du clergé devraient adorer en permanence le Saint-Sacrement.
  • L’usage de l’étole ne leur est pas prescrit pendant qu’ils adorent.
  • Les clercs qui entretiennent le luminaire seront toujours en surplis. Des laïcs peuvent suppléer ces clercs, à condition de revêtir la soutane et le surplis lors de l’entretient des cierges.
  • La génuflexion à deux genoux doit se faire toutes les fois qu’on entre ou qu’on quitte le sanctuaire où est exposé le Saint Sacrement, et chaque fois qu’on passe devant celui-ci.

Célébration de la messe

  • La messe ne sera jamais célébrée à l’autel de l’exposition, si ce n’est le 1er jour pour la messe d’exposition (encore que celle-ci ne débute « techniquement » en réalité qu’après la procession qui suit ladite messe) et le 3ème jour pour la reposition.
  • Les messes de l’exposition (le 1er jour) et de la reposition (le 3ème jour) seront des messes votives solennelles du Saint Sacrement (avec Gloria et Credo), chantées avec ministres sacrés (diacres & sous-diacres), sauf si ces messes votives sont empêchées par la messe du jour. Les jours empêchés, on dira la messe du jour avec mémoire du Saint Sacrement sous une seule conclusion. Toutefois l’antependium de l’autel d’exposition et le voile huméral seront toujours blancs, quelle que soit la couleur de la messe qui est célébrée.
  • Le 2nd jour on célèbrera une messe votive solennelle avec ministres sacrés, pour la paix ou pour une autre nécessité (avec Gloria – sauf si la messe est en ornements violets), selon les prescriptions de l’évêque.
  • Cette messe du 2nd jour ne sera célébrée ni à l’autel de l’exposition, ni à celui où serait conservée la réserve eucharistique.
  • Pendant la durée de l’exposition, on ne doit célébrer aucune messe de requiem.
  • L’antependium de l’autel de l’exposition sera toujours blanc, quelle que soit la couleur de la messe et de l’office du jour.
  • Lorsque le Saint Sacrement est exposé il est défendu de faire usage de la clochette aux messes basses. Il convient que son usage soit aussi interdit aux messes solennelles.
  • Il est de même interdit de faire toute quête dans l’église pendant que le Très-Saint Sacrement est exposé, ni d’y disposer des troncs spéciaux.
  • Les prédications pendant les Quarante-Heures ne sont pas encouragées ; mais si toutefois elles ont lieu, elles doivent être brèves et ne devront porter que sur l’Eucharistie ; il est interdit au prédicateur de faire usage de la barrette et de l’étole. Le prédicateur devra se placer de biais près de l’autel de l’exposition de sorte qu’aucun fidèle n’ait à tourner le dos à celui-ci.

Particularités de la messe d’exposition

  • L’autel est préparé avant la messe pour l’exposition mais seuls les six cierges habituels seront allumés au début de la messe. La croix de l’autel reste à sa place. Un corporal peut être placé au trône d’exposition, si celui-ci est distinct de l’emplacement de la croix de l’autel. L’ostensoir sera préparé, recouvert d’un voile blanc, ainsi que le livre qui devra servir aux prières finales après la procession (on les trouve dans le Rituale Romanum par exemple). On préparera aussi le dais, les cierges à porter pendant la procession et deux encensoirs pour celle-ci.
  • A cette messe du 1er jour, le célébrant consacre deux grandes hosties, dont l’une servira pour l’exposition.
  • L’ostensoir est placé sur le corporal après la communion.
  • A partir du moment où la seconde grande hostie a été renfermée dans l’ostensoir par le diacre, le reste de la messe est célébré avec les rubriques de la Missa coram Sanctissimo :
    • le célébrant et ses ministres font la génuflexion devant le Saint Sacrement chaque fois qu’ils s’approchent ou se retirent du milieu de l’autel,
    • lorsque le célébrant ou le diacre s’adressent au peuple (pour le Dominus vobiscum, l’Ite, missa est et la bénédiction finale), ils se placent de biais côté évangile afin de ne pas tourner le dos au Très-Saint Sacrement
    • au cours du dernier évangile, le célébrant génuflecte à Et Verbum caro factum est en se tournant vers le Corps du Seigneur.
  • Après le dernier évangile, le célébrant et ses ministres génuflectent à deux genoux au bas des marches de l’autel puis vont à la banquette où ils déposent leurs manipules, le célébrant laissant la chasuble pour prendre la chape, tout en ayant soin de ne pas tourner le dos se faisant au Saint Sacrement. La croix, les canons et le missel sont retirés de l’autel. Les deux thuriféraires viennent de la sacristie avec les éventuels céroféraires. Ils génuflectent à deux genoux en passant devant l’autel. Le célébrant impose l’encens – sans le bénir – aux deux encensoirs, à la banquette même (seule exception liturgique où cela se rencontre), assisté du diacre pendant que le sous-diacre soulève sa chape. Le célébrant et ses ministres vont s’agenouiller au pied de l’autel et il encense (avec l’encensoir du premier thuriféraire) le Saint Sacrement (comme au salut) puis reçoit le voile huméral blanc du cérémoniaire, que le sous-diacre attache. Le célébrant monte les marches avec ses ministres et s’agenouille. Le diacre, ayant fait la génuflexion sur le marchepied, prend l’ostensoir et le remet au célébrant agenouillé. Pendant ce temps, on forme la procession.

Procession du Saint Sacrement
Celle-ci ressemble beaucoup à la procession de la Fête-Dieu :

  • Les chantres entonnent alors l’hymne Pange lingua et la procession se met en marche.
  • Les confréries doivent marcher devant la croix et le clergé.
  • Le porte-croix est vêtu du surplis (et non de la tunique) et accompagné de deux acolytes et suivis des chantres.
  • Huit prêtres ou clercs doivent marcher devant le dais. Tous ont la tête découverte et il n’est pas permis de porter une calotte pour raison de santé.
  • Tous (clergé & peuple) portent des cierges en l’honneur du Saint Sacrement, qu’ils tiennent de la main extérieure.
  • Les ecclésiastiques parés ne peuvent revêtir que des ornements blancs.
  • Sur le parcours de la procession, on ne peut représenter des tableaux vivants de saints par des garçons ou des filles (cela se faisait beaucoup en France au XVIIème siècle).
  • Le clergé porte le dais. Toutefois, les magistrats les plus dignes peuvent les relayer pour porter les hampes du dais, mais seulement en dehors de l’église.
  • Deux thuriféraires devant le dais doivent encenser continuellement le Saint Sacrement sans se retourner.
  • Le célébrant, même évêque, doit marcher et porter l’ostensoir dans ses mains, et non à l’aide d’une quelconque machine.
  • Toutes les cloches doivent sonner pendant la procession, non seulement celles de l’église, mais aussi celles d’auprès desquelles la procession passerait. La procession peut aussi ne se faire que dans l’église (auquel cas elle prendrait par la droite en sortant du chœur pour prendre le bas-côté, puis remonterait l’allée centrale).
  • Si le parcours est long, un ou deux reposoirs peuvent être aménagés.
  • Au retour de la procession à l’autel où va avoir l’exposition, le diacre reçoit l’ostensoir du célébrant et le place sur le trône d’exposition. On chante alors les deux dernières strophes de l’hymne Pange lingua : Tantum ergo et Genitori Genitoque.
  • L’officiant impose l’encens & encense le Saint Sacrement comme à l’ordinaire.
  • Deux chantres viennent alors s’agenouiller au milieu du chœur et commencent les litanies des saints. Tous restent à genoux. Après les litanies, le célébrant toujours à genoux, entonne le Pater noster qui est continué en secret. Les chantres entonnent ensuite le psaume 69 Deus, in adjutorium meum intende que le chœur poursuit en dialoguant. Puis le célébrant chante les versets Salvos fac servos tuos et suivants. Il se lève à Dominus vobiscum et chante les 5 oraisons des Quarante-Heures sur le ton férial. Après ces oraisons, le célébrant chante le verset Domine, exaudi orationem meam, les chantres chantent le verset Exaudiat nos omnipotens et misericors Dominus et le célébrant termine recto tono sur une note grave : Fidelium animæ per misericordiam Dei requiescant in pace. Commence alors l’adoration du Saint Sacrement.
Messe de reposition des Quarante-Heures célébrée devant le Saint-Sacrement exposé.

Messe de reposition des Quarante-Heures célébrée devant le Saint-Sacrement exposé.

Particularités de la reposition
La reposition à la fin des Quarante-Heures est sensiblement identique à l’exposition, avec toutefois l’ordre suivant : messe / litanies des saints / procession / fin des litanies (au lieu de messe / procession / litanies des saints).

  • La messe de reposition doit être chantée à l’autel de l’exposition, devant le Saint Sacrement exposé, et doit, de ce fait, suivre les rubriques de la missa coram Sanctissimo.
  • A la fin de la messe, comme à la messe d’exposition, le célébrant et ses ministres vont à la banquette retirer manipules et chasuble ; le célébrant prend la chape. La croix d’autel (si il y en avait une d’utilisée), les canons d’autel et le missel sont retirés de l’autel, un corporal est déployé au centre de celui-ci, la clef du tabernacle et un voile huméral blanc sont préparés.
  • Les ministres sacrés & le célébrant reviennent s’agenouiller sur la première marche au bas de l’autel. Deux chantres, agenouillés au milieu de l’autel, chantent les litanies des saints suivies du psaume 69. Le célébrant chante les versets jusqu’au verset Domine exaudi orationem meam et sa réponse.
  • Vers la fin des litanies des saints, deux thuriféraires sont allés préparer les deux encensoirs, la procession se forme et on distribue à tous des cierges.
  • Quand le verset Domine exaudi orationem meam et sa réponse ont été chantés, le célébrant se lève et impose l’encens dans les deux encensoirs, sans bénir. Il reçoit le voile huméral et monte les marches avec ses ministres. Là le diacre donne au célébrant agenouillé l’ostensoir, comme au premier jour et on part en procession.
  • Pendant la procession, on chante le Pange lingua, comme au premier jour des Quarante-Heures, puis on revient à l’autel. Le diacre dépose l’ostensoir sur le corporal au milieu de l’autel. Les deux dernières strophes du Pange lingua (Tantum ergo & Genitori Genitoque) sont alors chantées, le Saint Sacrement étant encensé comme à l’ordinaire durant la dernière strophe.
  • Comme au salut, les chantres chantent le verset Panem de cœlo, le célébrant se lève pour chanter l’oraison du Saint Sacrement Deus qui nobis sub sacramento mirabili (sans Dominus vobiscum, comme à l’ordinaire) et ajoute les 4 autres prières des Quarante-Heures, comme au premier jour.
  • Comme au premier jour, après ces oraisons, le célébrant chante le verset Domine, exaudi orationem meam, les chantres chantent le verset Exaudiat nos omnipotens et misericors Dominus et le célébrant termine recto tono sur une note grave : Fidelium animæ per misericordiam Dei requiescant in pace.
  • Le célébrant donne alors la bénédiction du Saint Sacrement, comme à l’ordinaire. Le diacre remet le Très-Saint Sacrement au tabernacle, tous éteignent leurs cierges et on rentre à la sacristie après avoir salué l’autel.

Articles liés

Partages