Le Manifeste Müller vu par un Américain

Le Manifeste Müller vu par un Américain

De Robert Royal, traduit Par Yves Avril sur France Catholique :

Le cardinal Gerhard Müller a publié la semaine dernière un « Manifeste de la foi ». En fait, il a été divulgué prématurément par un groupe polonais. Le Manifeste était supposé paraître hier, la veille de l’anniversaire de l’annonce par Benoît XVI de sa démission, qui se trouve être aussi la veille de l’anniversaire de l’ordination de Müller, les deux anniversaires tombant le 11 février, aujourd’hui.

Comme tout ce que Müller a publié depuis que le pape François l’a écarté de la Congrégation pour la doctrine de la foi, ce Manifeste est riche à une multitude de points de vue, bien qu’il ne dépasse pas 4 pages. Beaucoup de gens lui ont demandé de clarifier les enseignements catholiques qui ont semblé douteux ces dernières années. Ainsi, d’une façon indirecte, nous avons finalement des réponses aux Dubia présentés au pape et auxquels François a choisi de ne pas répondre. Le Manifeste vise l’apparent indifférentisme du pape qui s’exprime dans la récente déclaration qu’il a signée avec des musulmans déclarant que Dieu veut une pluralité de religions.

Comme Muller le fait remarquer, la révélation trinitaire des Evangiles « pour la croyance en Dieu et pour l’image de l’homme marque une différence fondamentale avec la croyance des autres religions », et même celle des autres confessions monothéistes. Et c’est d’une importance cruciale pour notre compréhension non seulement de Dieu, mais de nous-mêmes.

L’Église est partie intégrante du plan spécial de Dieu parce qu’ « elle apporte avec l’autorité du Christ la révélation divine qui s’étend à tous les éléments de la doctrine, y compris l’enseignement moral sans lequel les vérités salvatrices de la foi ne peuvent pas être préservées, expliquées et observées. » (Catéchisme de l’Église catholique, 2035).

Dans ce qui est clairement un commentaire des questions sur le mariage évoquées par Amoris laetitia et sur l’intercommunion avec les non-catholiques, il énumère les groupes qui ne peuvent recevoir la communion : par la logique interne du sacrement les divorcés et les personnes civilement remariées, dont le sacrement de mariage existe devant Dieu, aussi bien que ces chrétiens qui ne sont pas en pleine communion avec la foi catholique et l’Eglise, tout aussi bien que ceux qui ne sont pas disposé à recevoir la Sainte Eucharistie avec fruit (CEC 1457), parce que cela ne conduit pas au salut. Faire remarquer cela correspond aux œuvres spirituelles de miséricorde.

Et il est tout à fait net sur l’effet cumulatif de l’incapacité à répéter des vérités fondamentales : « Beaucoup se demandent aujourd’hui quel est le but de l’existence de l’Église quand même des évêques préfèrent être des politiciens plutôt que de proclamer l’Evangile en tant qu’enseignants de la foi. »

De telles clarifications vont tout à fait dans le bon sens ces jours-ci. Mais j’ai été frappé par une ligne au début : « Aujourd’hui, beaucoup de chrétiens ne sont plus même conscients des enseignements de base de la foi » (italiques de nous), ce qui semble assez évident, bien que de nombreux responsables catholiques, même au plus haut niveau, aient longtemps semblé non concernés par cette absence de conscience.

Imaginez si une nation – en fait su vous êtes américain, vous n’avez pas besoin de faire beaucoup d’efforts – se réveillait un jour pour trouver qu’elle n’enseignait pas à ses enfants, ce qui veut dire ses futures générations, les vérités de base sur son passé ; les entraînant à lire, écrire et penser avec clarté et cohérence ; à faire des mathématiques de base, si bien que demander 2+2 = ? nous conduit dabs les embrouillamini philosophiques/théologiques.

Comment des parents responsables, des enseignants, des chefs réagiraient-ils ?

Benoît XVI remarquait dans une interview de 2010 que cela restait un mystère que des catholiques qui avaient suivi de écoles catholiques pendant une douzaine d’années ou plus, semblaient souvent en sortir avec une sympathie pour l’Islam ou une connaissance de base du bouddhisme, mais sans grande fidélité à l’égard de leur propre foi qu’ils ne connaissaient guère.
C’est plus qu’un problème d’éducation. Cela touche une des questions centrales sur la véritable nature du christianisme. Müller poursuit, dans cette phrase que j’ai précédemment citée sur la perte des vérités fondamentales, « il y a ainsi un danger croissant de manquer le chemin de la vie éternelle ».

Et dans la pensée chrétienne moderne nous avons ainsi souvent affaire à quelque chose qui a été laissé au bord du chemin. Est-ce que le Christ est ce qu’Il nous a dit Lui-même être : la Voie, la Vérité, la Vie ? Et non dans quelque manière vague et sentimentale qui nous feraient tous – finalement et de façon indulgente – des sauvés quoi que ce soit que nous pensions et que nous fassions. Mais dans celle, certes miséricordieuse, mais aussi exigeante – parfois même terrifiante – du Jésus réel des Evangiles qui parle de la Géhenne « où les vers ne meurent pas et où le feu ne s’éteint pas. » (Mc 9 :48)

Je soulève la question, tout à fait conscient que l’infernale machine de propagande a réussi il y a déjà longtemps à faire passer celui qui mentionne l’Enfer pour un dingue à cheveux longs au coin de la rue avec le signe : La Fin est proche. Pour beaucoup de gens, même des chrétiens, Dieu est un gars bien trop gentil pour de telles choses.

Mais ces paroles sont de Jésus. Comme Müller le remarque : » Nous devons résister résolument et clairement à retomber dans les anciennes hérésies qui voient en Jésus seulement une bonne personne, un frère et un ami, un prophète et moraliste. »

Il y a beaucoup d’horribles démons dans le monde, même dans le monde moderne, progressiste, éclairé. A commencer par les milliers d’innocents qui sont massacrés chaque jour avant leur naissance.

Même les Aztèques qui arrachaient les cœurs encore battants dans des sacrifices humains ou les anciens adorateurs de Moloch, n’allaient pas jusqu’à un tel nombre de victimes (N’en déplaise au pape et à son homologue musulman, toutes les religions ne sont pas égales et ne recherchent pas nécessairement les mêmes choses.)

Le bon berger connaît son troupeau, et son troupeau le connaît. Mais l’un et l’autre ne se connaissent pas seulement par l’odeur ou parce qu’ils sont du même troupeau – un troupeau peut être bon ou mauvais. Ils se connaissent l’un l’autre, s’ils sont des êtres humains et non pas simplement des animaux, avec leur cœur, leur intelligence et leur âme. Et cela signifie inévitablement qu’ils sont un parce qu’ils partagent et vivent les mêmes vérités.

Gloire à Müller pour sa vigoureuses clarté : « C’est la tâche véritable et propre des bergers de guider ceux qui sont confiés à eux sur le chemin du saut. Ce qui ne peut réussir que s’ils connaissent le chemin et le suivent eux-mêmes. »

Lundi 11 février, 2019
 
Source : https://www.thecatholicthing.org/2019/02/11/the-mueller-manifesto/

Robert Royal est rédacteur en chef de The Catholic Thing, et président du Faith & Reason Institute à Washington, D.C. Son livre le plus récent est A Deeper Vision : The Catholic Intellectual Tradition in the Twentieth Century, publié par Ignatius Press. The God That Did Not Fail : How Religion Built and Sustains the West, est maintenant disponible en livre de poche chez Encounter Books.

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