« L’euthanasie mine les fondements de notre pratique médicale »

« L’euthanasie mine les fondements de notre pratique médicale »

Andreia Cunha dos Santos Silva dresse un triste constat de la dépénalisation de l’euthanasie en Belgique et en Suisse. Médecin généraliste à Bruxelles d’origine portugaise, elle constate que malgré des conditions légales « très strictes », beaucoup de patients demandent l’euthanasie en dehors du cadre prévu par la loi et les familles qui l’exigent pour un proche sont très nombreuses. Une dérive ? « Il est utopique de croire que l’on peut contrôler ces pratiques », explique le médecin. Même les militants confessent, pour la Belgique, plus de 1000 euthanasies par an « non sollicitées (et donc hors la loi) »[1]. Le professeur Jean-Louis Vincent, par exemple, justifie ces euthanasies à l’insu du patient en expliquant que certains courent le risque d’une qualité de vie « médiocre » en cas de guérison et que l’euthanasie est donc meilleure pour eux. Somme toute, il appartiendrait au médecin « de décider qui mérite de vivre et qui mérite de mourir »…

 

Ces dérives viennent d’une « conception purement utilitariste de la fin de la vie », associée au« dogme de l’autonomie du patient ». Rien ne résiste plus à cela quand on y ajoute la notion, tellement subjective, de « qualité de vie ». Alors, l’euthanasie devient une simple proposition « thérapeutique » parmi d’autres… « L’euthanasie mine les fondements de notre pratique médicale »déplore Andreia Cunha.

 

C’est l’interdiction de tuer, constitutive de la médecine, qui a permis le développement des soins palliatifs. Ceux-ci sont encore très peu développés au Portugal, pays qui vient de refuser de légaliser l’euthanasie à quelques voix près (cf. Le Parlement du Portugal rejette l’euthanasie). Et le médecin alerte les législateurs : si le Portugal n’investit pas « dans un système national efficace de soins palliatifs ainsi que dans la formation de tous les professionnels de la santé à leur pratique », la mort sera de plus en plus difficile à accompagner et l’euthanasie reviendra en force, jusqu’à « l’eugénisme par l’élimination des personnes âgées ». Les conditions d’accès seront restrictives au début, puis ce « sera le début de la rampe glissante qui va plus tard forcer la même porte à s’ouvrir au nom d’un ’droit de mourir’ pour tous ceux qui le demandent ». Elle n’est pas seule à craindre ces dérives et ajoute même que «  les promoteurs de la ‘mort assistée’ le savent très bien ». D’autant qu’il est « très facile, et certainement moins cher pour nos gouvernants d’avoir une loi pour permettre la mort des citoyens » (cf. Les soins palliatifs génèrent des économies substantielles ).

 

Andreia Cunha exhorte le gouvernement portugais à « encourager socialement et économiquement le renforcement des liens familiaux et de proximité » pour que les patients soient mieux accompagnés, pour que plus personne n’arrive seul à une mort commandée, pour que plus personne ne souffre faute de médicaments adaptés, pour que plus personne ne puisse « se sentir un fardeau pour sa famille et pour la société, après l’avoir servie comme citoyen et enrichie par son travail ».

 

[1] Belgique : 1000 euthanasies par an sans consentement du patient

 

Source Généthique

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