Sri Lanka : le magazine Social Justice est relancé par des prêtres

Sri Lanka : le magazine Social Justice est relancé par des prêtres

Le magazine Social Justice, que relancent deux prêtres sri-lankais des Oblats missionnaires de Marie seize ans après la fermeture du journal, cherche à promouvoir la démocratie et la justice et à soutenir l’harmonie et l’égalité des minorités ethniques dans le pays. Les prêtres souhaitent aussi, par cette initiative, sensibiliser la population sur des problèmes brûlants comme la vague de violences religieuses qui secoue l’île depuis quelques mois.

Des prêtres sri-lankais des Oblats missionnaires de Marie Immaculée (OMI) ont relancé le magazine Social Justice (Justice sociale) seize ans après l’arrêt de la publication. Le journal défend la démocratie et la justice dans le pays, ainsi que l’harmonie et l’égalité pour les minorités ethniques. Le premier numéro, sur les thèmes de l’extrémisme religieux et de la radicalisation, est sorti ce mois-ci. « Social Justice n’a jamais fait partie des berceuses, des platitudes et des stéréotypes qui endorment la population », confie le père Rohan Silva, président du Centre for Society and Religion (CSR) qui publie le magazine. « Au contraire, il a plutôt servi de signal d’alarme à des moments inattendus, afin de déranger la population dans son ‘sommeil’ », a-t-il confié aux militants, aux prêtres et aux religieuses rassemblés le 4 juillet à Colombo pour le lancement du magazine.

Le Dr Harini Amarasooriya, anthropologiste et maître de conférences à l’université ouverte du Sri Lanka (Open University of Sri Lanka), souligne que les problèmes abordés par le magazine sortent exactement au bon moment pour le public. « Dans le contexte des tensions que traverse le pays actuellement, le lancement du magazine est très important », soutient-il. « Le magazine nous rappelle qu’il y a des institutions qui provoquent l’insécurité dans notre société. Il a été une source de grande inspiration à son heure de gloire, et maintenant, nous en avons besoin plus que jamais. Aujourd’hui, la religion se retrouve souvent associée à des évènements vraiment sinistres. Social Justice montre que même la religion peut être exploitée à des fins mauvaises. »

Le père Silva ajoute que le magazine a un rôle crucial à jouer afin de sensibiliser la population sur des problèmes qui continuent de plomber la société sri-lankaise. « Social Justice a eu le courage de parler ouvertement des problèmes liés à la réalité sociale, politique, économique et culturelle du pays », explique le prêtre, qui a été autrefois supérieur de la congrégation des Oblats Missionnaire de Marie Immaculée pour le Sri Lanka, le Bangladesh, le Pakistan et le Japon. « Nous devons faire tout notre possible afin de défendre la démocratie dans le pays. » Le magazine s’est arrêté en 2002, alors que le Sri Lanka était encore au milieu d’une guerre civile meurtrière qui a duré 26 ans, et qui a finalement pris fin en 2009 quand l’armée a anéanti toute résistance de la part des Tigres Tamouls. Toutefois, la majorité bouddhiste de l’île est encore en proie à l’intolérance religieuse. Plusieurs émeutes antimusulmanes ont eu lieu fin février et début mars dans le district de Kandy.

Une mission de sensibilisation

Elles ont provoqué au moins deux victimes, une douzaine de blessés, et l’arrestation de plus de quatre-vingts bouddhistes cingalais, accusés d’avoir attaqué des maisons, des commerces et des lieux de culte musulmans. Les émeutes ont été provoquées par la mort d’un chauffeur bouddhiste cingalais, suite à l’attaque présumée de quatre musulmans en état d’ivresse. « Cette mission de sensibilisation de la population – qui est plutôt satisfaite du statu quo – aux problèmes que nous traversons n’est certainement pas une tâche facile ou agréable », ajoute le père Silva.

Le magazine Social Justice a été lancé en 1937 par le père Peter Pillai (OMI), le fils d’un directeur d’école et le plus jeune des cinq fils d’une famille catholique. Plus tard, il a étudié à Cambridge et à l’université de Londres (University College London). Le père Pillai a été ordonné à Rome à l’âge de trente ans. En 1936, il a fondé une association pour l’enseignement catholique sri-lankais (Catholic School Guild) avant de lancer le magazine peu après, afin de défendre la justice sociale et les droits des travailleurs au Sri Lanka. Le contrôle du magazine a été confié au père Tissa Balasuriya (OMI) en 1987, puis aux pères Oswald B. Firth (OMI) et Richard Dias, qui ont été rédacteurs en chef de 1996 à 2002, avant que des difficultés financières ne provoquent la fermeture du journal. Le père Asphold Stephen, directeur général du Centre CSR, confie que les politiciens instrumentalisent la foi de la population afin de défendre leurs propres intérêts, et qu’ils manipulent la religion à des fins politiques.

« Toutes les religions au Sri Lanka, et même dans le monde entier, commencent à adopter ou à montrer des signes de comportements militants et agressifs », a-t-il déclaré dans un communiqué annonçant la première édition de juin-juillet. Shanthi Kumar Hettiararachchi, le nouveau rédacteur en chef de Social Justice, ajoute que son objectif premier et d’aider le Sri Lanka à devenir une société plus juste et plus démocratique, qui respecte tous ses membres, quel que soit leur rôle. « Au fond, nous faisons la même chose que ce que nous faisions autrefois, nous l’avons simplement adapté au contexte socio-économique actuel. »

Source: Eglises d’Asie

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